jeudi 23 septembre 2010

HISTOIRES DE MER




pour l'amour d'Angelika...
Buenos Aires, Ushuaia, Valparaiso, Ile de Pâques, Fidji, Singapour… c’est pour voguer vers ces contrées aux noms évocateurs de chasse au trésor et d’aventuriers au visage buriné, qu’Heidi a salué les pensionnaires de la maison de retraite qu’elle dirigeait  pour suivre son musicien de mari, Udo, juste retraité du Philarmonique de B., Allemagne.
De son doigt de violoniste, il survole le planisphère, un regard gourmand de petit garçon devant un chou à la crème, il égrène le nom des ports qui donneront la mesure à son tour du Monde, encore sonné d’avoir franchi le fil ténu de sa vie d’avant, enjambé d’un pas de géant la frontière du presque non-retour, tiré un grand trait sur ce qui a rempli ses soixante dernières années, son travail, sa maison, ses manies de terrien… Il n’a pas fixé de limites à son voyage, ne connait pas la date de retour, n’a pas la moindre idée de la fin de son parcours. Comme un animal de compagnie qui suivrait son maître, son instrument a trouvé sa place dans le bateau, à l’abri de l’humidité dans un écrin de velours…




Il y a aussi Axel, 28 ans, croisé à son retour. S’est réveillé un beau matin devant le choix crucial de son existence : effrayé par la route déjà tracée, laissant derrière lui un profil de carrière, une maison à construire et une famille à fonder, il a embarqué sur son rafiot sa compagne Jeanne, qui n’avait jamais navigué, ohé, ohé… s’est envolé vers le Brésil où il avait toujours rêvé d’aller. Presque sept mois près de Sao Paulo, un morceau de vie dans l’embouchure des fleuves, il s'est baigné dans l’eau limoneuse des estuaires cernés par la mangrove… et s’en est retourné, parce que Jeanne avait le mal de mer.
Une autre page à écrire les attend à Paris.



cours accéléré de pain à la poêle (filmé pour tv goteborg)


Et puis Jan et Per, beaux-frères à la ville, qui ont pris la poudre d’escampette ; leurs épouses les rejoindront dans six mois à la Barbade, et Per prendra le chemin du retour à sa vie de labeur, laissant Jan continuer son chemin, peut-être avec son âme-sœur, si elle choisit de le suivre. Jan évoque le plaisir de voguer sur les côtes de son pays, la Suède, la beauté des îles qui parsèment la mer intérieure partagée avec la Finlande et le Danemark, devant nous, pauvre auditoire, qui ignorions jusqu’à l’existence d’une mer navigable dans cette partie du globe…
Il parle aussi de son expérience humanitaire de conducteur de camion, dans les contrées reculées de l’Europe de l’Est : Transylvanie, Moldavie, Roumanie, un autre monde aussi , d’autres images surgissent, très éloignées de la douceur salée de notre décor de privilégiés.



Et d'autres encore, histoires de mer prises à la volée, au bord du quai : ces deux jeunes bretons, qui ont franchi au ralenti, faute de vent et de moteur, le bras de mer entre Porto Santo et Madère, juste le temps de croiser deux baleines, saluer quelques dauphins, apercevoir une tortue qui flottait sur sa coquille, et ferrer un requin qu’ils n’ont pas oser remonter à bord. Cruel dilemme...




Voyages tous azimuts, écoute attentive obligée pour ne pas passer à côté de ces récits parfois hachés sur du mauvais anglais, rencontres d'hommes et de femmes très éloignés des clichés de grands aventuriers : ni Kersauson, ni Bombard, pas même Antoine : parfois timides, un peu empruntés, qu'on ne remarquerait pas dans le métro, avec juste une petite flamme dans les yeux, celle du demain qu'il ont choisi.


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