La chance des amateurs (ou des innocents) était avec nous : le passage du détroit de Gibraltar, première véritable difficulté de notre voyage, s’est déroulé comme dans un rêve, très loin de tous les scénarios que j’avais imaginés.
Partis de Marbella vendredi matin 13 août à 7 h (déjà un signe…), nous étions au large de Gibraltar vers 13 heures, mer d'huile, légère brume ; le rocher un peu dans le brouillard, entouré de cargos au mouillage qui attendaient comme les poids-lourds devant la frontière française un dimanche soir, l'autorisation d'entrer dans la baie ou de passer le détroit, on ne sait pas. Et puis l'entrée dans la baie, un peu inquiets au début, cernés que nous étions par ces mastodontes de ferraille, pratiquement tous au mouillage aussi, très impressionnants comme des gros toutous qui finalement se laissent facilement apprivoiser : alors nous avons slalomé entre ces grosses carcasses pour entrer dans Marina Bay, premier et sûrement dernier port anglais où nous accosterons.
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Le rocher vu du sud, au premier plan, le phare et la mosquée |
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Marina Bay |
Petit tour rapide de la ville, sorte de pâle reflet d’Eurodisney, mâtiné de relents de Pas de la Case, avec ses bureaux de tabac et ses boutiques d’électronique, et, en supplément, des pubs et des cabines téléphoniques rouges. A chaque croisement, une statue en bronze représentant un valeureux soldat à différentes époques, nous rappelant les glorieux faits d’arme de l’armée britannique dans ce stratégique poste avancé de la péninsule ibérique. Nous ne sommes pas allés voir les singes… avec déjà le sentiment d’avoir fait le tour du sujet.
Le Samedi 14 août, 9 heures, appliquant à la lettre les instructions nautiques, nous traversions la baie d’Algésiras pour nous poster exactement, trois heures après la pleine mer, au bord du détroit et entreprendre sa traversée. Le vent était avec nous, dans la bonne direction et la vitesse idéale pour ne pas contrarier les vagues. Trois heures plus tard, nous contournions le phare de Tarifa, pointé sur l’Afrique, pour remonter, déjà, de l’autre côté de l’Espagne, celle dont j’ignorais presque l’existence avant de préparer notre voyage.
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Le rocher sous les nuages |
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Vers la sortie de la Baie d'Algésiras
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Phare de Tarifa |
Quelques remous, un peu d’écume sur la crête des vagues capricieuses, un sentiment d’urgence, celle d’avancer avant que le courant nous soit contraire, et puis le cap vers Barbate, premier port de plaisance qui nous accueillerait après cette journée particulière, marquée par cet exploit, modeste, mais inscrit pour toujours dans notre petite légende personnelle.